Le Saut du Doubs : plus grande cascade descendue en kayak d’Europe – L’interview de Maxime Le Morvan

Le 22 octobre 2019, quatre kayakistes décident de s’attaquer au Saut du Doubs, une cascade de 25 mètres de haut (équivalente à un immeuble de 7 étages) située sur la frontière franco-suisse.

D’ordinaire impraticable à cause de la présence d’une dalle rocheuse au milieu de la chute, le Saut du Doubs entre en crue suite aux fortes pluies du mois d’octobre 2019. Le débit d’eau augmente alors drastiquement, permettant la descente.

 

Aujourd’hui, j’ai la chance d’accueillir Maxime Le Morvan, l’un des auteurs de cet exploit salué dans toute la France. Bonjour Maxime et merci de m’accorder cette interview !

Commençons par le commencement : depuis combien de temps faites-vous du kayak ?

M.L.M – J’ai commencé vers 7 ans. Mon frère en faisait et j’ai décidé de le suivre. Quand on est jeune, c’est assez effrayant, alors j’ai décidé d’arrêter peu de temps après. Et puis, j’ai repris après une grande pause d’environ 3 ans.

Depuis, j’ai forgé mon expérience du kayak dans plusieurs pays d’Europe.

Le Saut du Doubs, c’était un projet de longue date ?

M.L.M – Oui, ça faisait 2 ans qu’on voulait s’y attaquer. On a déjà fait plusieurs repérages, notamment pendant l’été 2018. Le débit d’eau était insuffisant pour franchir le pas, alors on a attendu la bonne occasion.

La décision de sauter se présente le jour même ou bien quelques jours avant au moment de la prévision des crues ?

M.L.M – On l’avait envisagé quelques jours avant, mais c’est le jour même que le projet s’est concrétisé. Quelques heures avant, on profitait de la crue sur une rivière un peu plus loin.

Le problème, c’est qu’il n’y a pas de webcam sur le site, donc impossible de voir à quoi ça ressemble tant qu’on ne s’y rend pas. Le seul indice qu’on avait, c’est le débit de l’eau qu’on pouvait consulter sur une application. Une fois sur place, on s’est rendu compte que la cascade était encore plus impressionnante que ce qu’on imaginait. Mais c’est une bonne chose !

Comment se passe la préparation avant de sauter ?

M.L.M – On savait déjà quelle trajectoire emprunter grâce aux repérages et à notre expérience. Le plus gros de la préparation sur le moment, c’était le mental !

Le plus important, c’est d’être dans un état d’esprit détendu. La surtension, ça peut être très mauvais pour ce genre de chute. Il faut être prêt à l’impact, savoir qu’on va toucher l’eau violemment et peut-être rester immergé pendant plusieurs longues secondes. Il faut également préparer la chute et la position du bateau pour ne pas se prendre un coup de kayak sur la tête.

Est-ce qu’il y a eu de l’hésitation le jour J ?

M.L.M – Évidemment, il y a toujours de l’hésitation. C’est un monstre encore plus effrayant en vrai que sur les vidéos. Il faut savoir que les cascades en Europe ne sont généralement pas aussi imposantes. C’est sur le continent américain qu’on en trouve le plus.

« D’ailleurs, le Saut du Doubs est aujourd’hui interdit aux kayakistes. L’embarquement pour la chute se fait du côté suisse et la dangerosité du saut n’a pas été bien accueillie là-bas. »

Le Saut du Doubs en pleine crue

Qu’est-ce qu’on ressent au moment du saut ?

M.L.M – Sur le moment, ça fait ressortir des peurs enfantines ! Mais c’est une grande dose d’adrénaline pendant seulement quelques secondes. Et le fait que la cascade soit impressionnante est un avantage, car plus il y a d’eau, plus la chute est amortie.

Le Saut du Doubs est un record ?

M.L.M – Oui, le Saut du Doubs est aujourd’hui reconnu par la communauté comme étant la plus grande chute d’Europe jamais réalisée en kayak.

Maxime Le Morvan et ses amis célébrant leur exploit

Plus jeune, vous étiez déjà attiré par l’idée de battre un record ?

M.L.M – Pas vraiment. J’étais plus tourné vers la compétition. Je faisais du slalom. Les rivières et les cascades ne me tentaient pas, tout simplement parce qu’elles me faisaient peur. Puis, à force d’entraînement, j’y ai pris goût.

Le Saut du Doubs est un superbe souvenir et une grande expérience, mais le fait de battre un record, c’est quelque chose qui s’est présenté à moi, plutôt qu’une finalité que je recherchais.

Aujourd’hui, vous êtes guide de canyoning et rafting, mais aussi professeur d’EPS et formateur de moniteurs de canoë-kayak. Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ces métiers ?

M.L.M – J’ai toujours aimé faire découvrir ma passion aux autres et leur donner les clés pour progresser en autonomie. Le canyoning ou le canoë-kayak sont des sports qui peuvent rebuter les gens à première vue, et j’aime l’idée de pouvoir changer leur vision et de rendre ces sports accessibles au plus grand nombre. Je réalise des sorties canyoning près de Perpignan et Narbonne avec Pyrénées Canyoning pour tous les niveaux.

Un nouveau challenge en vue ?

M.L.M – La situation actuelle rend les projets assez difficiles, mais j’aimerais bien pouvoir affronter des cascades impressionnantes comme celles de Norvège ou d’Autriche. On y trouve des chutes équivalentes au Saut du Doubs. L’Islande est aussi un décor magnifique pour du canoë-kayak.

Mais je pense que mon plus gros objectif, c’est l’Amérique du Sud. C’est un coin très réputé pour les cascades incroyables.

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